Le projet de renforcement des capacités des chefs traditionnels pour une meilleure gouvernance locale est d’une très grande importance parce qu’il permet à ces autorités traditionnelles de disposer en plus de leurs connaissances des us et coutumes, des connaissances administratives et juridiques de bases devant leur permettre de mieux accomplir leurs missions auprès de leurs populations et aussi de l’Etat.
Il faut noter que dans certains pays d’Afrique comme le Cameroun par exemple, les chefs traditionnels sont depuis le décret de 1977 organisant les chefferies traditionnelles au Cameroun des auxiliaires d’administration et à ce titre, ils doivent valablement représenter l’administration à laquelle ils sont auxiliaires.
Quand on parle d’auxiliaire d’un corps, on voit une formation à la base ! Pour exemple, les avocats, les huissiers et les notaires sont des auxiliaires de justice. Ils reçoivent de ce fait une formation à la base pour l’exercice de leur fonction ce qui n’est pas le cas pour les chefs traditionnels qui sont considérés comme des auxiliaires d’administration mais qui pourtant ne reçoivent aucune formation de base devant leur permettre de mieux accompagner l’administration dans sa mission régalienne. A cause de ce manque de formation, on peut constater de multiples dérives de certains chefs traditionnels posant des actes au-delà de leurs rôles. Il faut noter que beaucoup parmi eux ne connaissent pas l’étendue des pouvoirs de l’administrateur auxquels ils sont auxiliaires encore moins leur propre mission en tant qu’auxiliaire d’administration.
Certains sont de véritables vecteurs de trouble et de déstabilisation sociale. qu’ils soient désignés par dévolution successorale ou nommée par l’administration pour ce qui est de certains chefs de 3e degré, cette désignation ou nomination ne tient pas compte du niveau académique de la personne, conséquence beaucoup parmi eux sont des illettrés ou n’ont pas fait des études suffisantes devant leur permettre de disposer des connaissances et compétences pour l’exercice de leurs fonctions pour une meilleure gouvernance. Un programme de formation leur permettra de mieux cerner leurs rôles dans la société moderne puisque avant l’avènement des Etats, le pouvoir était exclusivement entre les mains des chefs traditionnels mais avec l’Etat, le pouvoir est entre les mains du Chef de l’Etat. Il faut en redéfinissant les pouvoirs des chefs traditionnels, prévoir des formations pour le renforcement de leurs connaissances.
La non connaissance des questions administratives et juridiques de base ne permet pas à ces chefs traditionnels de résoudre les problèmes de base de leurs populations d’où la recrudescence des litiges après chaque décision rendue par le chef dans les affaires relevant de sa compétence.
Faut-il encore préciser que la méconnaissance des lois par ces chefs ne favorise pas leur travail sur le terrain et que cela à une incidence sur le circuit judiciaire tout entier ? Les litiges de faibles ampleurs qui pourraient être tranchés à la base par le chef se retrouvent devant les juridictions de droit commun causant ainsi certaines lenteurs dans le traitement d’autres demandes.
Si le taux élevé des litiges dans les juridictions civiles sont liés au foncier c’est tout simplement parce que les populations ont pour patrimoine premier la terre. Le chef de village est le juge par excellence des problèmes de terres surtout en milieux ruraux. En milieu urbain, ils sont très peu sollicités par les populations à cause de l’existence des tribunaux à proximité. Il est donc important de les outiller et principalement ceux des milieux ruraux afin qu’ils puissent rendre des jugements éclairés sur la base des lois lorsqu’ils sont appelés à se prononcer sur un problème qu’il relève du domaine foncier, successoral ou familial quid au justiciable d’ester en justice s’il n’est pas satisfait de la décision rendue par le chef. Mais qu’en tout état de cause, le chef l’a rendu sur la base de la loi et non de sa volonté personnelle ou mieux de la coutume qui est en dessous de la loi et parfois pas en phase avec la loi qui émane de la volonté générale.
NB: les us et coutumes sont différentes en fonction des tribus et sont parfois contraire aux lois raison pour laquelle, il faut enseigner les lois aux autorités traditionnelles.
Certains problèmes ne mériteraient pas être débattus devant les juges de droit commun en raison du nombre de dossiers déjà pendant devant les juridictions. Le chef traditionnel devrait donc être capable de jouer son rôle d’auxiliaire d’administration en ce qui concerne la prise des décisions dans le souci du maintien de la paix sociale et de l’ordre publique dans sa localité.
Ce projet est donc censé rappeler aux chefs traditionnels non seulement les responsabilités qui leur incombent en vertu de la loi et de l’autorité morale qu’ils exercent sur leur population, mais aussi de manière globale, aider les institutions locales à prévenir les conflits communautaires et ce à travers des formations en matière de Droit et d’autres domaines utiles à la gouvernance.
In fine, ce projet vise donc à combler ce sérieux manque de connaissances dans un domaine assez complexe par le biais d’une initiative axée sur le renforcement des capacités afin de permettre à ces gardiens de la tradition et auxiliaires d’administration d’exercer efficacement leur rôle, en prenant les décisions éclairées (appuyées par des bases légales) pour leurs populations, avec effet de désamorcer des situations qui encombrent inutilement nos prétoires.